Concert de Chants Spirituels au Collège Saint-Grégoire (26.09.2020)

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Concert de Chants Spirituels au Collège Saint-Grégoire (26.09.2020) (Youtube)

 

Quand une icône libanaise du chant spirituel donne un récital en mémoire des victimes de l'explosion du Port de Beyrouth, l'on peut s'imaginer l'émotion qui saisit les spectateurs, en présentiel ou à distance...

Mais combien plus forte, voire indescriptible, est l'émotion quand il s'agit de Mme Joumana Mdawar, dont la voix et les chants sont à eux seuls une magnifique prière, et que de surcroît le récital de chants spirituels est donné depuis le Collège Saint-Grégoire, ce cœur battant de Beyrouth fortement stigmatisé par le tragique événement du 4 août dernier...

C’est dans cette atmosphère de dénuement recueilli et de douce espérance que, le samedi 26 septembre 2020 à 19h, via une retransmission en direct du Collège Saint-Grégoire (sur Télé Lumière et la page Facebook du Collège Notre-Dame de Jamhour), le Révérend Père Recteur Charbel Batour S.J. a inauguré, en présence d'une quarantaine de membres de la famille de Jamhour et Saint-Grégoire, le récital donné par Joumana Mdawar.

Le recteur a d’abord passé en revue les images de mort et de destruction qui ont marqué à tout jamais les esprits des Libanais, puis il a rendu un vibrant hommage à tous ceux qui ont perdu la vie, dont 7 membres de la famille de Jamhour (Alexandra NAGGEAR, Krystel EL ADM, Delia GUEDIKIAN PAPAZIAN, Hala SABBAGH TAYAH, Jean-Marc BONFILS, Fady NAIM, Jean-Frédéric ALAM), mais aussi à tous ceux qui ont été touchés dans leur chair, dans leurs propriétés, ceux qui ont tout perdu, ceux qui, en désespoir de cause, ont dû plier bagage et quitter définitivement le pays… Sans s’attarder sur les nombreuses causes du mal qui déchire notre pays (négligence, manque de responsabilité, indifférence, ou attaque préméditée…), le Père Recteur, sur un ton plein de confiance et de résilience, a invité à contempler le Christ en croix, portant notre attention sur la glorieuse lumière émanant du corps ensanglanté de notre Sauveur, assurant qu’un jour, le dernier mot ne sera ni à la haine ni à la mort, mais à l’amour et à la vie…  

Le P. Batour a ensuite chaleureusement salué la présence de Joumana Mdawar, dont il dit que l’interprétation de ‘’Haloummi ya jamilati’’ (‘’Viens ma toute belle’’, extrait du Cantique des cantiques), durant la répétition, lui a d’emblée rappelé le célèbre poème ‘’Beyrouth ya set el dounia’’ de Nizar Qabbani, et pour cause…

Avant d’enchaîner sur le récital, le Père Recteur a aussi vivement remercié le compositeur M. Joseph Khalifé, le pianiste M. Marc Abou Naoum ainsi que l’ingénieur son et lumière M. Chadi Saad (parent d’élève), grâce auxquels le concert virtuel a pu être donné sur place et ce, dans les meilleures conditions.

Comment décrire ce récital qui ne ressemble à aucun autre sans prendre le risque d’affadir, par de simples mots, les impressions et tout le ressenti qui, eux, sont au-delà de toute expression…

Nous le dirons simplement ainsi :

Trois magnifiques florilèges de chants, puisés aux répertoires maronite libanais (‘’Ya Charbel sa3edna’’…) et occidental (‘’Vivre d’amour’’, de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus ; ‘’Ya Rou7 el Masi7 qaddisini’’, traduction arabe de la prière de Saint Ignace de Loyola : ‘’Anima Christi sanctifica me’’…), ont été ponctués de deux méditations sur deux passages clés de l’Évangile :

  • Première méditation : Lue par Mme Claire Hindi (catéchète au Petit Collège), la lettre de Saint Paul apôtre aux Romains (8, 31b-39) se révèle d’une brûlante actualité… De fait, elle s’adresse à chacun de nous, certifiant que notre seul refuge est l’amour indéfectible du Christ pour chacun : ‘’Aucune créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ…’’ (‘’ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur’’).
  • Deuxième méditation : Lues en arabe par le Vice-Recteur, le Révérend Père Denis Meyer S.J., les Béatitudes (Matthieu 5, 3-12) ont revêtu ce soir-là tout leur sens… De fait, lire les paroles du Christ (‘’Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu’’…) dans un cadre dévasté par l’explosion meurtrière est d’autant plus percutant que le but du récital est de transmettre, non seulement à notre pays, mais aussi au monde entier, un message de paix, d’amour, d’ouverture à l’autre…

Si les chants spirituels avaient autant de charge émotionnelle ce soir-là, c’est parce que, sublimées par la voix chaude et puissante de Joumana Mdawar, sur fond d’un bâtiment flamboyant sous les lumières de l’éclairage, leurs paroles, rayonnantes de l’Esprit d’Amour, magnifiaient le cadre alentour : comment le cœur ne vibrerait-il pas en écoutant le chant exquis ‘’Haloummi ya jamilati’’ (dont l’interjection ‘’haloummi’’, signifiant ‘’yalla’’ qui n’a pas son équivalent français, est une invitation pressante du fiancé appelant impétueusement sa bien-aimée à le suivre dans sa ronde d’amour !) mais encore ‘’Dawwi ya njoum’’ (Joseph Khalifé), ‘’Vivre d’amour’’ (Sainte Thérèse), ‘’Salibouna intasar’’ (Bienheureux Abouna Ya3qoub), mais encore ‘’Sallou aynama kountom’’ (Joseph Khalifé) et, bouquet final, le merveilleux chant à la gloire du Christ, vainqueur de la mort et de la haine ‘’Ya awwal el nab3i’’ (Joseph Khalifé)…

À l’issue du récital, Joumana Mdawar a vivement remercié le Père Provincial, le Père Recteur, le Vice-Recteur, la Communauté des Pères Jésuites du Collège, le compositeur M. Joseph Khalifé, le pianiste M. Marc Abou Naoum ainsi que l’ingénieur son et lumière M. Chadi Saad, mais aussi les catéchètes qui se sont engagés en amont de ce récital, soulignant que l’Esprit Saint était bien à l’œuvre dans tous les cœurs ce soir-là. Elle a enfin mis en exergue le rôle de chacun de nous, Libanais, dans la reconstruction de notre pays, insistant sur le fait que cela n’est possible que grâce au Christ.

Pour clôturer, le P. Batour a vivement remercié Joumana Mdawar, à qui il a décerné une plaque souvenir du Collège Notre-Dame de Jamhour, et il a aussi pris soin de remercier, un à un, tous ceux qui ont contribué à la mise en place et à la réussite de ce concert. Dans son mot de la fin, le recteur a surtout mis en lumière le fait, heureux, d’avoir chanté ce soir-là la vie et l’amour, qui, tôt ou tard, triompheront des forces du mal dans notre cher Liban…

À son tour, Père Denis Meyer a offert à Joumana Mdawar une de ses toiles de peinture (réalisée d’un seul jet, comme il l’a précisé) représentant le port de Beyrouth après l’explosion… Une peinture où les couleurs sombres soulignent l’impact du mal, mais où la présence de la Croix signifie la puissance salvatrice de la Passion/Rédemption (lieu de passage entre les silos de blé détruits et le ciel), et où l’ouverture, symbolisée par un beau ciel bleu, représente cette Force Vive de Dieu qui nous permet d’aller toujours de l’avant

Ginette Salha – BCP

 

Tableau offert à Mme Joumana Mdawar
à l’issue du concert du 26 septembre 2020,
au Collège Saint-Grégoire

 

Cette peinture a été faite d’un jet.
Elle est remplie de tout ce qui m’a habité après ce qui s’est passé le 4 août.

Au bas du tableau des couleurs plutôt sombres avec une ouverture qui passe par la Croix.

Beyrouth est aussi un bateau, le bateau est le symbole de Beyrouth.

Le corps du bateau est le Silo à blé qui a permis
à Beyrouth de ne pas disparaître complètement.
La voile est tenue par la Croix.
Dans la voile, il y a le visage de tous ceux qui ont souffert
et qui sont restés consternés devant ce qui s’est passé.
Le Christ prend tout cela avec lui.
L’ouverture, c’est le ciel qui va nous permettre de tenir
et d’aller toujours de l’avant.

Denis Meyer, S.J.

26 août 2020