L'Orient-Le-Jour : La « Jamhour Alumni US » honore Philippe Jabre, le « roi des hedge funds »

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Liban-Société
NEW YORK, de notre correspondante Sylviane ZEHIL | OLJ - 10/11/2015

Le douzième événement organisé il y a quelques jours (30 octobre 2015) par « Jamhour Alumni US » (JAUS) au prestigieux Mandarin Hotel de New York, a attiré une audience de 215 anciens et amis du Collège Notre-Dame de Jamhour, dont 40 % de jeunes professionnels et universitaires venus rendre hommage à l'invité d'honneur, le « roi des hedge funds », Philippe François Jabre. L'élite de la diaspora libanaise présente porte bien haut les couleurs du Liban aux États-Unis dans les domaines de la médecine, de la recherche, de la technologie, des start-up et de l'informatique, sans compter les affaires, la banque, la finance, la restauration, le journalisme, et l'enseignement universitaire.


Né en 1960, Philippe François Jabre, ancien élève de Jamhour, promo 77, est fondateur du fonds Jabre Capital Partners, un « hedge fund » exemplaire basé à Genève. Philanthrope de renom, il est aussi président de l'Association Philippe Jabre, une ONG qu'il a fondée, basée à Sin el-Fil, au Liban. Cette association finance des universités et offre des bourses aux étudiants et institutions socio-médico-économiques. « Parmi les jeunes présents ici, dix ont bénéficié des bourses de notre association, » relève-t-il avec satisfaction à L'Orient-Le Jour.
Constamment connecté aux marchés mondiaux, Philippe Jabre sait écouter et absorber tous les chocs. Malgré les risques et les crises, ce « survivant » au grand flair et savoir-faire, affiche de hautes performances et une confiance imperturbable. Savoir gérer ses émotions semble être son grand secret. Sa simplicité, sa vision, son professionnalisme, ses réalisations et sa générosité proverbiale ont envoûté une audience avide d'inspiration et d'exemple à suivre, comme l'ont démontré les questions qui lui ont été posées.

Un événement « réussi »
Orchestrée avec une très grande minutie, et superbement fleurie par Nada Sara, cette manifestation qui, selon les participants, est « l'une des soirées les plus réussies » de JAUS, a provoqué l'enthousiasme et l'élan généreux des anciens et amis du collège et son réseau, permettant d'atteindre, haut la main, les objectifs projetés. L'événement s'est déroulé en présence du représentant permanent du Liban auprès de l'Onu, Nawaf Salam, accompagné de son épouse Sahar, du consul général du Liban à New York, Majdi Ramadan, et son épouse Vanessa, de Mgr Simon Kassas, conseiller auprès de la Mission du Saint-Siège à l'Onu, de Carla Jazzar, chargée de mission à l'ambassade du Liban à Washington, et du nouveau père recteur du collège, Charbel Batour sj. En parfait maître de cérémonie, Dr Gabriel Sara a utilisé sa magie proverbiale et son talent de communicateur pour donner à la soirée son cachet familial et amical.

Nouvelles du collège
S'adressant en parfait anglais à une audience attentive, le père Charbel Batour a exprimé « sa gratitude » pour cette communauté libanaise de New York qui s'enrichit, « de génération en génération, par le nombre croissant d'étudiants qui quittent le Liban pour les États-Unis. » Décrivant les réalisations et les défis du Collège Notre-Dame de Jamhour, qui compte cette année 3 200 élèves, le père recteur a mis en exergue l'importance des cinq écoles jésuites au Liban, à savoir : le Collège Notre-Dame de Jamhour, le Collège Saint-Grégoire, appelé Jamhour d'Achrafieh, et trois autres collèges faisant partie du réseau Jamhour de la Békaa. » Le père Batour a remercié JAUS pour toute l'aide apportée au Collège Notre-Dame de Jamhour et aux trois collèges de la Békaa. « Je suis impressionné par toute votre énergie, par votre extraordinaire organisation, par votre gaité communicative et par votre profonde solidarité, » a-t-il constaté avec admiration.

Idées innovantes
Relatant le décès tragique de l'élève Mélanie Freiha, survenu lors d'un accident de ski, le père Batour a relevé que cet incident a déclenché de nombreuses idées innovantes. « Trois élèves de Jamhour ont inventé un drone pour surveiller les pentes de ski. Cette invention majeure leur a permis de rafler la médaille d'or à l'«International Warsaw Invention Show 2015 ». Sur sa lancée, il a annoncé la création d'un conseil d'orientation pour les élèves désireux de poursuivre leurs études dans des universités à l'étranger, ainsi que la création du nouveau département d'informatique. Il a, par ailleurs, signalé l'inauguration prochaine du monument dédié aux 70 « martyrs » de l'école, morts durant la guerre du Liban.
Le collège se trouve toutefois confronté à de nombreux défis dus à la situation « très délicate » du Liban, à l'échelle de la situation humanitaire créée par la présence de 1,5 million de réfugiés syriens dans le pays, et son impact sur les nombreuses familles libanaises qui ne peuvent plus payer les frais scolaires. « C'est la première fois dans l'histoire de Jamhour que le collège puise dans la caisse de solidarité pour payer les salaires des professeurs. Il est de mon devoir de trouver des moyens et de nouvelles stratégies afin de réduire nos dépenses, stabiliser et améliorer nos revenus, » a-t-il souligné.

Appel poignant
Les présentations se sont succédé à un rythme léger. Après avoir entendu le témoignage d'un élève parrainé par JAUS que Cynthia Hajal a lu, Nada Sara a pris la parole pour lancer un appel poignant à l'audience, rappelant la devise de cette association : « Une nation éduquée ne meurt jamais. » « Promouvoir l'éducation n'est-il pas notre meilleure façon de soutenir nos collègues libanais ? » a-t-elle relevé. Et de préciser : « Au cours des dernières années, votre généreux soutien a permis d'amasser près de 2 millions de dollars et de fournir plus de 2 000 bourses à des enfants dans le besoin. Compte tenu de la crise régionale et locale, les enfants au Liban ont besoin plus que jamais de nous. Donc ce soir, nous nous engageons à aider les 299 élèves des écoles de la Békaa et 50 étudiants nécessiteux de Jamhour. Notre objectif est d'amasser 215 000 dollars. Car ce soir, il est de notre devoir de donner en retour ! Ce soir, c'est l'occasion de passer le flambeau de l'éducation à ceux qui sont moins privilégiés ! » Cet appel a provoqué aussitôt l'élan généreux de l'audience pour assurer la scolarisation de 347 élèves.

Résilience, clé du succès
C'est dans le cadre d'une conversation conviviale avec Philippe Jabre, menée par Dr Gabriel Sara, que l'audience a pu saisir la vision, la philosophie, le parcours et les conseils suggérés par l'invité d'honneur. Cette interaction a été animée par des questions pertinentes posées par l'audience. Philippe Jabre se souvient d'emblée de vouloir se lancer dans la finance, un choix original dans un domaine bien peu connu du public. « Quand j'étais à Jamhour, parmi les 31 élèves de ma classe, 25 voulaient devenir médecins, se souvient-il. Trois désiraient suivre les traces de leurs parents. Un seul a choisi la finance, à une époque où personne ne savait ce que c'était. » Mais la guerre du Liban a marqué un tournant décisif dans sa vie. « La guerre, en 1976, était un désastre que nous avons surmonté », dit-il.

Le secret de son succès ? « Je pense que la clé du succès, pour la plupart d'entre nous, c'est notre résilience. Nous avons tous un métier très volatile ; nous pouvons rater une opération et beaucoup d'autres choses dans notre vie, mais il est important de persévérer. Nous avons tous perdu très tôt nos années d'insouciance parce que nous devions traiter de problèmes importants, estime-t-il. Je pense que la nouvelle génération de jeunes qui se trouvent ici a plus de chance. Ils sont exposés à de bonnes universités. De mon temps, nous n'étions que deux ou trois Libanais à Columbia University. C'est un avantage de la guerre de nous avoir forcés à aller à l'étranger et à être exposés à une meilleure éducation, » note-t-il.
« Dès le début, nous avons été confrontés à des situations très difficiles. Il a fallu résister, continuer à lutter. Cela nous a donné une résilience qui nous a permis de nous préparer à des jours meilleurs. Nous n'avions pas le choix d'échouer et cette confrontation avec la réalité nous a rendus très résilients. La seule chose que nous ayons est notre éducation et ses avantages. Ce concept de ne pas avoir droit à l'échec nous fait travailler encore plus dur, pour être là », relève-t-il avec simplicité.


Vue de l’audience.
On reconnaît de gauche à droite Nada Sara, Philippe Jabre, Sahar et Nawaf Salam,
Zaza et Alexandra Jabre, Carla Jazzar et Mgr Simon Kassas.

Philippe Jabre en conversation avec Dr Gabriel Sara.
   

 

Regard sur l'économie 
Son regard sur l'économie est chargé d'optimisme. « Je crois que mon métier de gérer l'argent est très volatile. Je dis aux investisseurs de ne pas regarder les hauts et les bas du marché ; de ne pas lire la presse ni regarder la télé, au risque de paniquer. Laissez-moi m'en occuper. Laissez les professionnels s'en préoccuper et revenez après trois ans. Il est important de regarder au-delà des événements immédiats », assure-t-il.
Quel parcours ? Philippe Jabre décrit son parcours universitaire de Jamhour où il a été un étudiant moyen ; deux à Paris, un à l'AUB puis à Montréal où il a fait un BA avec honneur en économie à Concordia, puis il fait un MBA à Columbia University à l'âge de 20 ans. Il décroche son diplôme en 1982, à 22 ans, en étant le plus jeune étudiant de sa promotion. « J'ai travaillé en France, j'ai travaillé à Londres pendant 20 ans dans une grande banque, puis dans une banque d'investissement, puis dans un "hedge fund", puis j'ai démarré ma propre compagnie, il y a neuf ans, à Genève. C'est ce que je fais depuis 35 ans. »

« J'étais pressé de commencer à travailler dans la finance. Mon premier job a été en France et les temps étaient difficiles. Il y avait le contrôle des changes. Les gens quittaient le pays avec un carnet de devises. Les taux d'intérêt étaient à 15 pour cent. Il y avait des dévaluations de la monnaie partout en Espagne et en Grèce. Comparé à aujourd'hui, c'est le paradis, avec une devise comme l'euro et le dollar, et les taux d'intérêt à zéro. L'Amérique est une place privilégiée du point de vue économique. Aujourd'hui, les taux d'intérêt sont très bas ; l'inflation très basse ; l'épargne fonctionne ; votre banque ne fera pas faillite. Vous ne saurez que plus tard que cette période est peut être les meilleures années du point de vue économique. Le monde a changé avec l'Internet et la technologie. C'est une vraie révolution comparée à il y a trente ans où on ne pouvait avoir que dix choix pour du travail. Aujourd'hui, on a plus de cent choix dans la spécialisation. Ce qui ouvre beaucoup plus d'opportunités à beaucoup plus de gens », affirme Philippe Jabre.
 

La Jamhour Alumni US
Créée en 2004, Jamhour Alumni US Inc. (JAUS) est une organisation à but non lucratif, enregistrée dans l'État de New York, ayant pour but d'aider le collège dans sa mission éducative. Le comité actuel est composé de :
Élias Sayegh – Président
Dr Gabriel Sara – Vice-président
Karim Awad – Trésorier
Dr Christian Rizk – Membre fondateur
Bud Zehil – Membre fondateur
Nada Sara – Membre, organisatrice d'événements
Cynthia Hajal - Membre
Sandra Jeanbart – Membre
Carine Assouad – Membre
Jimmy Keyrouz – Membre
Bassel Kikano – Membre